Depuis 1950, la production mondiale de plastiques n'a cessé d'augmenter passant de 1,5 à 348 millions de tonnes en 2017. Du fait de rejets ou de dysfonctionnements des filières de gestion, on estime, même si ces estimations sont grossières et les incertitudes extrêmement fortes, que plusieurs dizaines de millions de tonnes de déchets plastiques sont rejetés dans nos environnements et qu'entre 0,5 et 2,4 millions de tonnes rejoindraient chaque année les océans.
Le projet MacroPLAST (2017-2020) porte sur l'estimation des flux de macrodéchets plastiques transitant en Seine. Ce projet, financé par le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire (MTES), s'inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la Directive Cadre de Surveillance du Milieu Marin. Il participe ainsi à l'élaboration du diagnostic en matière de pollution plastique. Mieux appréhender les flux continentaux et la dynamique de ces déchets est en effet la condition préalable à leur réduction significative en mer, puis à l'évaluation des politiques publiques mis en œuvre pour les réduire. Durant ce projet, différentes méthodes telles que le traçage de déchets par GPS ou des lâchers d'objets marqués ont permis d'appréhender la dynamique des macrodéchets et mieux quantifier leur flux.
Sur le bassin de la Seine, bien loin des très impressionnantes estimations entre 1 000 et 6 000 t/an selon l'approche la plus répandue, les résultats suggèrent des flux de plastiques bien moindres, compris entre 100 et 200 t/an. L'utilisation de balises GPS contenues dans des macrodéchets a mis en évidence des échouages fréquents et systématiques des macrodéchets sur les berges et leur immobilisation de quelques jours à plusieurs semaines/mois selon les facteurs environnementaux. Ce point suggère que le nettoyage des berges, justement là où les déchets flottants vont s'échouer, peut offrir une opportunité intéressante aux politiques publiques pour la réduction de la pollution plastique. Une analyse du rapport entre le coût de ce type d'opération et le tonnage ramassé confirme en outre qu'il est le plus pertinent comparativement à d'autres opérations de nettoyage.
Parce que les processus d'échouage et de remobilisation des macrodéchets dépendent non seulement des propriétés des déchets, mais aussi des facteurs locaux et de la géomorphologie du fleuve, plusieurs trajectoires GPS d'objets plastiques sont actuellement en cours d'acquisition dans l'estuaire de Loire. Les premiers résultats suggèrent des séquences analogues d'échouage et de remobilisation des déchets bien que la géomorphologie des deux fleuves diffère. Ces résultats, s'ils sont confirmés, pointent ainsi des comportements similaires entre deux estuaires macrotidaux.
Pour la Seine ou la Loire, bien au-delà de l'estimation des flux transitant dans les fleuves, ce type d'approche est utile aux politiques publiques pour identifier des zones d'accumulation et soutenir des actions de réduction de la pollution plastique. Compte tenu des relativement faibles tonnages effectivement exportés en mer par rapport aux quantités de déchets produits, il convient de rappeler que ce n'est pas dans les solutions curatives que se joue l'objectif « zéro plastique en mer », mais dans des changements structurels du « système plastique ».